Charles Vion d'Alibray (1600-1653)
Sonnet satyrique
Toi que nous estimons si savant et si sage,
Tu soutiens, Philémon, et soutiens hautement,
Que ce que nous nommons du nom de mariage
Ne doit point s'appeler du nom de sacrement.
Mais comment, cher ami, nous tiens-tu ce langage ?
Est-ce par raillerie, ou si c'est autrement ?
Tu sais ce qu'une femme apporte de tourment,
Ce que c'est des enfants, ce que c'est du ménage.
Crois-tu donc qu'un mortel voulût souffrir ces maux
Qu'il connaît ici-bas n'avoir point leurs égaux,
Si d'un sacré lien il n'avait la croyance ?
Pour moi, loin de tenir ces propos hasardeux,
Au lieu d'un sacrement je crois que ce sont deux
Et que le mariage enclot la Pénitence.
Paul Scarron (1610-1680)
Sonnet
Superbes monuments de l'orgueil des humains,
Pyramides, tombeaux dont la vaine structure
A témoigné que l'art, par l'adresse des mains
Et l'assidu travail, peut vaincre la nature :
Vieux palais ruinés, chefs-d'oeuvre des Romains
Et les derniers efforts de leur architecture,
Colisée, où souvent ces peuples inhumains
De s'entr'assassiner se donnaient tablature :
Par l'injure des ans vous êtes abolis,
Ou du moins, la plupart, vous êtes démolis ;
Il n'est point de ciment que le temps ne dissoude.
Si vos marbres si durs ont senti son pouvoir,
Dois-je trouver mauvais qu'un méchant pourpoint noir,
Qui m'a duré deux ans, soit percé par le coude ?