J'ai teint de mon sang leurs épines.
Adieu, fleurs qu'on ne peut cueillir.
— La sève descend aux racines,
La nature va défaillir.

Adieu, fleurs qu'on ne peut cueillir :
Joie, amour, bonheur, espérance !
— La nature va défaillir
Dans une indicible souffrance.

Joie, amour, bonheur, espérance,
Que vous étiez beaux autrefois !
— Dans une indicible souffrance,
Faut-il que tout meure à la fois ?

Que vous étiez beaux autrefois,
Au clair soleil de la jeunesse !
— Faut-il que tout meure à la fois ?
Est-il sûr qu'un jour tout renaisse ?

Au clair soleil de la jeunesse,
Pauvre enfant d'été, moi, j'ai cru.
— Est-il sûr qu'un jour tout renaisse,
Après que tout a disparu ?

Pauvre enfant d'été, moi, j'ai cru !
Et tout manque où ma main s'appuie.
— Après que tout a disparu,
Je regarde tomber la pluie.

Et tout manque où ma main s'appuie.
Hélas ! les beaux jours ne sont plus.
— Je regarde tomber la pluie…
Vraiment, j'ai vingt ans révolus.

Écrit en 1865, publié en 1881 dans : "Souvenirs rassemblés par sa mère et poésies inédites".