Daniel Gros-Circan Poème classique

Tout est relié, hommes, plantes, animaux, minéraux. Tout participe à la même vie
qui s'écoule en toutes choses, témoin cette sensation que l'on éprouve parfois
de ne faire qu'un avec l'univers, et que ce dernier est en nous et non pas au dehors.

La vie n’est qu’une seule vie

J'ai bien souvent marché le cœur silencieux,
Parcourant au pas lent des hommes de prière
Les sentiers éclairés d'une douce lumière,
Quand l'ombre succédait au couchant radieux.

Dans la brume montant sur les plaines tiédies,
Je croyais discerner la présence alentour
D'êtres mystérieux que la chute du jour
Appelait à quitter les landes engourdies.

II me semblait ouïr des paroles sans voix
Qui, chacune, éclatait comme fait une bulle,
Si légère, si brève, une simple virgule,
Ponctuant le refrain des roches et des bois.

Mon âme transpirait cette foule confuse
Instillant en l'espace un indicible émoi ;
Lors, je ne savais plus qui d'autre, qui de moi,
Chuchotait à la brise étrangement diffuse.

Je comprenais pourtant ce verbe à l'unisson :
La vie, affirmait-il, n'est qu'une seule vie.
D'un souffle elle défait le feu de notre envie ;
Nos formes passeront le temps d'une moisson.

Oniris - Poésie classique, 04/03/2017.

Michel64 Poème néoclassique

Le vent du sud, en passant par-dessus les Pyrénées, peut générer un effet de foehn
puissant. Il apporte alors, sur le piémont, des vents forts, rafaleux et chauds, ainsi
que de magnifiques ciels aux nuages dits "lenticulaires" qui s'embrasent au couchant.

Le vent du sud

Le vent du sud, pressé, enjambe la montagne
Comme un trop-plein de ciel tout à coup exhalé ;
Son haleine fiévreuse est pleine des "Olé !"
Et des "Madre de Dios !" arrachés à l'Espagne.

Dans sa course il étire et lisse les nuages
En longs poissons d'argent sur un fond bleu, vibrant,
Annonçant pour le soir un tableau célébrant
La folie d'un Van Gogh, par-dessus les alpages.

Tout s'envole et tout court quand la bourrasque gagne
La hêtraie rebroussée par son souffle puissant,
Et les feuilles séchées s'amassent en crissant
Aux vallons que jadis traversait Charlemagne.

La fougeraie roussie semble descendre en vagues
Dans la combe où s'éploient les brebis agitées ;
Les palombes, perdues, paraissent emportées,
Tandis que les chevreuils, saoulés de vent, divaguent.

II est fou, il rend fou et quand dans le village
II envahit la place, il faut voir les enfants
Courir les tourbillons, fébriles, s'esclaffant...
Et les chats les plus doux redeviennent sauvages.

Oniris - Poésie néo-classique, 12/02/2015.