Maurice Donnay (1859-1945)




Le serpent et le cor de chasse




Un jour, un grand serpent, trouvant un cor de chasse,
Pénétra dans le pavillon
Et comme il n'avait pas beaucoup de place,
Dans l'instrument le reptile se tasse.
Mais, terrible punition !
Quand il voulut revoir le grand air et l'espace,
Et la vierge forêt au magique décor,
Il eut beau tenter maints efforts,
Il ne pouvait sortir du cor,
Le pauvre boa constrictor ;
Et pâle, il attendit la mort.

Moralité :

Dieu ! comme le boa est triste au fond du cor !

Ailleurs, 1892.

Le Sire de Chambley (1857-1941)




Sonnet pointu




Reviens sur moi ! Je sens ton amour qui se dresse ;
Viens. J’ouvre mon désir au tien, mon jeune amant.
Là… Tiens… Doucement… Va plus doucement…
Je sens tout au fond ta chair qui me presse.

Rhythme  ton  ardente  caresse
Au  gré  de  mon  balancement.
Ô  mon  âme…  Lentement,
Prolongeons l’instant d’ivresse.

Là… Vite ! Plus longtemps !
Je fonds ! Attends
Oui… Je t’adore…

Va ! Va ! Va !
Encore !
Ha !

La Légende des sexes, poëmes hystériques, 1882.