Nadine Baguet Sonnet néoclassique
Perte de temps
Un jour nous atteindrons, naufragés inutiles
L'insolente folie du rivage dernier
Et de nos ventres clos, s'émiettera l'exil
Des souvenirs vivants de nos réalités
Lorsque la faim, la soif, le désir et l'envie
Ne seront plus que l'ombre d'un spectre déchu
Nos sens silencieux plus têtus que l'ennui
Rendront l'imaginaire à nos temps suspendus
Et lorsqu'à cet instant d'unique certitude
La Camarde à nos os poussera son soupir
Comprendrons-nous enfin dans ce dernier respir
La vaine fatuité de nos exactitudes ?
Qu'il faut laisser passer la lenteur dans nos corps
Et que perdre son temps est le propre des morts ?
Jean-Marie Caillou Poème néoclassique
Souvenir
Souvent tu m'as conté ton souvenir ancien ;
Quand aux heures pâles des matins inconnus
Sur un quai de gare dans l'attente d'un train,
Fillette attentive tu tenais dans tes mains
Ta valise d'enfant d'un rouge souvenu,
Un bagage porté comme le plus grand bien.
De juste innocence, tout entière et futile,
Avec tes si grands yeux, ta figure poupine,
En objet tant chéri des amours parentales,
Tu arrachais les jours comme autant de pétales
Ignorant de la fleur la douleur des épines
Dans la quiétude des bonheurs infantiles.
À travers ton récit je veux gagner ce temps ;
Te prendre dans mes bras pour te mettre à l'abri
De l'outrage des ans, de leur terme annoncé ;
Et je veux entendre ton rire cadencé,
Sentir le souffle heureux de tes jeux incompris ;
Sur ta joue effleurée y cueillir le printemps.
Concours Flammes Vives de la poésie 2020,
Section néoclassique – Flamme de bronze.